Un billet très intéressant chez Raphaël Goetter sobrement appelé « Introspections technologiques » m’inspire celui que vous être en train de lire. Ce dernier explique son sentiment mitigé envers cette course à l’armement qui se passe actuellement en intégration et plus largement dans le front-end. Frameworks, pré-processeurs, post-processeurs, automatiseurs, etc.
Je pourrais expliquer mon avis sur le sujet, mais en fait, je l’ai déjà abondamment fait dans un commentaire. Cela vous fera deux excuses pour aller vite lire ce bon billet.
En fait, je m’interroge plutôt sur le pourquoi de cette course à l’armement. J’ai une idée sur la question.
Comme on le dit, pour comprendre son présent, il faut aller chercher dans son passé. L’intégration a longtemps été le dernier maillon de la chaine, la cinquième roue du carrosse, bref, appelez ça comme vous voulez. Aujourd’hui, avec le responsive, les performances, l’accessibilité, etc. qui concernent le front-end, on remarque une certaine revalorisation de ce métier. Qui n’a jamais entendu de moqueries sur du JavaScript il y a 10 ans ? Ou sur CSS ? Et même encore maintenant même si c’est devenu plus rare (vous oseriez vous moquer d’un bon développeur JavaScript ? Moi pas).
Je pense pouvoir dire que ce domaine a même pris une certaine honorabilité. À juste titre, il y a eu un appel d’air assez formidable et la complexité a fait des bonds de géant. Tellement de choses passent par le front-end. Je vis des situations proprement impensables il y a dix ans. Pour ne donner qu’un exemple : je suis régulièrement sollicité pour exécuter des intégrations, et les domaines qui gravitent avec (back-end et graphisme par exemple) écoutent ce que j’ai à dire et plient à mes volontés. Ce qui ne se serait jamais vu il y a dix ans : on m’aurait dit de fermer ma gueule et de faire exactement comme le graphiste ou le back-end a dit.
Notez que je ne suis pas là pour dire qu’un poste est plus important que l’autre. Je constate un rééquilibrage, plutôt sain d’ailleurs. Le domaine subit en prime d’énormes mutations.
Du coup, l’intégration qui n’a jamais pu se regarder le nombril… se le regarde enfin depuis quelques années. En sont sortis des outils, des méthodes, des approches purement « intégrationnelles », si vous me permettez ce néologisme. Même si – en toute honnêteté – on n’invente pas l’eau chaude ainsi (la conception objet n’est pas née avec OOCSS), on recrée des choses pour l’intégration et uniquement dans ce but.
Je ne dis pas que se regarder le nombril est mal : le domaine en a besoin et c’est normal qu’il réagisse ainsi. Il a besoin de créer ses codes (son code !), de trouver ses repères, de grandir, etc.
Ajoutons à cela qu’avec l’appel d’air évoqué plus haut et le côté tentaculaire du Web, cela ne peut que partir dans tous les sens. Nous sommes dans une grande phase d’exploration, avec ses excitations, ses frustrations, ses erreurs, etc. Seulement, Raphaël Goetter pose bien la question qui tue : quid de la pérennité de tout ce foisonnement à l’avenir ?
J’avais – peut-être pas aussi adroitement que je l’aurais souhaité – essayé de le faire comprendre lors d’une intervention l’année dernière à Paris Web : l’intégration se trouvera une voie en arrêtant de se regarder le nombril, en allant voir ce qui se passe autour (vers 13mn 30s dans la vidéo). En servant des objectifs autres que les siens : la qualité, les utilisateurs, etc.
Certains le font très déjà très bien : regardez l’intervention de Kaelig à Sud Web Mieux communiquer avec son équipe grâce à Sass. Il utilise un outil pour permettre à divers intervenants de mieux se comprendre et de mieux travailler ensemble.
Que ce soit clair : les notions de passé, présent et futur sont très relatives, ce n’est pas linéaire. Il y a des périodes où il faut savoir se regarder le nombril pour ne plus avoir à le faire ensuite, et pour y revenir.
Mais cela n’est et ne doit jamais être un but en soi. L’intégration ne doit pas commettre les mêmes erreurs qui ont été commises à son encontre.