Quand je faisais mes études à l'I.U.T S.R.C de Savoie Technolac, j'ai eu l'honneur d'écouter et de discuter avec une personne extraordinaire nommée Christophe Martin De Montagu lors des cours sur le son. Il nous expliquait les bases durant nos cours : comment mixer un score, l'importance du rapport image/son quand on sonorisait une séquence, etc.
Plus que la technique sur le son, car c'est un domaine où à mon grand dam je suis… loin d'exceller, c'est surtout sa philosophie que j'ai retenu. Une anecdote qu'il a mentionné un jour a retenu toute mon attention : en grand professionnel, il travaille avec du matériel de très bonne qualité et peut se permettre donc de mixer avec beaucoup de détails qui s'entendront sur du bon matériel. Toutefois, quand il est en train de mixer en studio, il garde toujours à proximité une enceinte de très mauvaise qualité afin d'entendre son travail dans des conditions limites désastreuses.
Car bien sûr, tout le monde n'a pas une chaine avec de super-enceintes et une pièce dédiée à l'écoute de la musique !
J'y vois un parallèle assez frappant avec la conception de sites Web. Le graphiste a en général un ou deux superbe(s) écran(s) 24 pouces de très bonne qualité (et la tendance s'accentue, les derniers écrans Retina sont supposés avoir un rendu encore plus beau), l'intégrateur a une très bonne connexion qui lui permet de gagner du temps et travaille sur un navigateur moderne comme Firefox, etc.
Toutefois il arrive que l'internaute…
- navigue sur un navigateur pourri,
- ait une connexion très lente,
- ait un écran très mal calibré avec un rendu des couleurs proprement horrible,
- consulte un site sur un smartphone en plein soleil et soit gêné par les reflets,
- etc.
Comme dirait Morpheus à Néo dans Matrix : Welcome to the real world. En substance, votre chef d'œuvre va être utilisé dans des conditions pas toujours optimales, loin de là !
C'est pour cela que quand je travaille, il y a toujours un vieil ordinateur peu mis à jour, lent, avec un navigateur bien pourri qui traine dans le coin (une version 6 est préférable), et je regarde toujours voir si l'expérience – même si je sais éperdument qu'elle ne va être pas terrible – reste un minimum correcte.
Certains appelleront ça le test sur un ordinosaure, sur une bouse (sic), pour ma part, j'appelle ça « le test sur la vieille croûte », et cela fait partie intégrante de ma checklist qualité. Cela invite à jouer à l'équilibriste et rappelle que le monde n'est pas fait uniquement d'écrans parfaits consultés dans des conditions parfaites.
Ainsi votre graphiste comprendra que sa nuance de 2 valeurs héxadécimales n'est pas visible sur un écran pourri et doit être vraiment accentuée si on veut la remarquer, à votre intégrateur que son travail sur les performances n'est vraiment pas inutile, etc.
Et vous, vous pratiquez « le test sur la vieille croûte » ?
Depuis hier (oui, c'est récent), j'ai libéré la plus petite des deux machines et n'en utilise plus qu'une (avec 2 écrans tout de même). Et l'ancienne machine (qui doit avoir plus de 5 ans) va se faire formater / ré-installer prochainement pour que toute l'équipe puisse avoir accès à une croûte.
Fabrice