À la grande époque de la Super Nintendo était sorti un jeu extrêmement bien pour l'époque nommé Starwing. Un des passages les plus étranges du jeu était le mythique Black-Hole (trou noir en anglais) où le vaisseau se trouvait dans une dimension bizarre, les ennemis semblaient perdus, même la musique était étrange.
Il arrive parfois que vous ayez des projets où vous devez faire preuve d'une incroyable intelligence, rassembler toutes vos connaissances, les faire cohabiter, inventer des trucs nouveaux, pousser votre cerveau à ses limites, bref vous transcender. Vous allez être fier de montrer ces projets.
Et il arrive de temps en temps l'exacte antithèse de ces projets, on vous demande de faire à peu de choses près tout ce qu'il ne faut pas faire, quelques exemples :
- Utiliser des vieilles balises horribles comme
marquee
(défilement latéral) oublink
(clignotement), qui sont des non-sens sur pleins d'aspects (accessibilité, séparation forme/structure, etc.), - Intégrer des images sous-échantillonnées en grand format (si vous avez un peu de chance, elles sont particulièrement hideuses en prime),
- User de navigations improbables et non-sensiques, etc.
J'appelle ces projets les puits sans fond, les projets Black-Hole : rien ne s'en échappe, pas même la lumière minimale d'un peu d'accessibilité ou d'ergonomie. C'est l'extrême particularité de ces projets, il n'y a pas un aspect qui est foireux, mais TOUS. Tout est sacrifié, tout y passe. Certains clients peuvent être pénibles, mais le site est montrable au final. Là, vous avez la totale, vous ne pouvez pas montrer ce site, sauf pour en rire.
L'histoire est souvent la même : vous proposez, le client veut autre chose, vous déconseillez, il insiste, vous persistez, il ne lâche rien et s'entête. Arrive un moment où soit la collaboration s'arrête (c'est une option), soit elle continue et vous lâchez du lest. Et si je peux vous donner un conseil, c'est d'en lâcher beaucoup. Vos standards de qualité vont subir un affront dont vous ne soupçonnez même pas la monstruosité. Même si cela commence par une demande parfois anodine, un enchainement de choses va transformer votre projet en soupe immonde.
Le point commun à ces trous noirs est un client qui est persuadé d'avoir la science infuse et souvent très mal informé des bonnes pratiques en matière de sites internet.
Il vous reste un unique choix si vous continuez ces projets :
- soit d'essayer de maintenir un minimum de cohérence/qualité dans ce projet, ce qui va être très ardu car maintenir de la cohérence dans le chaos va vous coûter beaucoup d'énergie, énergie que vous n'économiserez pas dans les mises à jour futures (le chaos nourrit le chaos),
- soit lâcher prise et partir totalement en live dans le délire. Solution radicale, mais qui vous fera gagner du temps (oui, c'est un intégrateur qui sert ses pages en
application/xhtml+xml
qui dit ça, vous ne rêvez pas !), vu que votre client vous emmènera forcément dans le chaos.
Je m'approprie une célèbre réplique de film, retouchée pour l'occasion : « la première règle du projet chaos, c'est on ne parle pas du projet chaos ».
Je lance un appel : chers clients, si nous vous déconseillons quelque chose, ce n'est pas pour le plaisir de vous casser les pieds, c'est parce qu'il y a une ou plusieurs raison(s). Ok, nous ne sommes pas parfaits, mais nous connaissons quand même notre métier.
Heureusement, c'est assez rare que les projets déraillent à ce point, mais cela arrive.
Et vous, avez-vous déjà connu des projets de type Black-Hole ?
1/ On a pas forcément le budget
2/ Le client n'est pas forcément conciliant
3/ On a pas forcément le budget pour prendre le temps d'expliquer pourquoi ce type de projet est un trou noir.
4/ Le client possède un entourage : nous ne sommes jamais deux dans une relation prestataire/client et prendre le temps de donner les clés d'explication pour qu'il puisse justifier ces points auprès de ces proches est souvent également très long. Sur des petits contrats, on file vers la perte malheureusement.
Ce qui est malheureux, c'est que ce n'est pas seulement vrai pour nos métiers.